EMMANUELLE BAYART

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SUPERSTRUCTURE, Emmanuelle Bayart et Timo Kirez, 2013
Installation, reproductions d'une carte postale de Genève, tourniquet retourné peint en blanc

1) Comme Brecht qui a écrit : "Une photographie de l’usine Krupp ne dit rien sur l’usine Krupp."
2) Comme Adam Smith qui a parlé "de la main invisible du marché".

3) Comme Marx qui a remis la dialectique de Hegel "sur ses pieds", pour exprimer que la réalité objective s’explique par son existence matérielle et son développement.
4) Comme Slavoj Zizek qui pense que l’idéologie se compose comme les deux faces d’une même médaille : celle d’un système politique qui annonce publiquement des valeurs et celle d’un "revers caché", un "secret sale".
5) Comme Jean-François Lyotard qui a écrit dans "La Condition postmoderne" que le temps des "métarécits" n’est pas fini.

Genève se donne une image. Mais, comme écrit Heiner Müller dans son poème "Image":
"Les images veulent tout dire au début. Sont solides. Spacieuses.
Mais les rêves font des caillots, deviennent forme et désillusion.
Le ciel déjà, aucune image ne le contient plus. Le nuage vu
D’Avion : une vapeur qui obstrue la vue."

La répresentation pour barrer le regard, un obstacle. La réalité comme construction, un recueil de contes. L’image de Genève au jet flamboyant, internationale, neutre, havre de paix et de tranquillité, reproduit sans cesse dans les brochures et sur les cartes postales – une chimère. Ou plutôt une feinte, le cheval de Troie.
Il faut remettre la soi-disant réalité sur sa tête, la secouer et la rendre impossible car il n’y a pas d’utopie sans désillusion. Faire tomber la vapeur et libérer le regard.